dimanche 21 juin 2009

première partie

Vendredi 8 octobre 2004. Ca fait deux ou trois jours que j’ai mal au bide, genre gastro mais pas net. Je ne mange quasi rien à midi, et décide d’aller chez le médecin l’après midi. Je lui précise une douleur coté gauche, pas de fièvre, légère diarrhée. Elle diagnostique une gastro suite à une angine et me donne des antibiotiques. Je passe néanmoins une très mauvaise nuit, car la douleur n’est pas très forte mais persistante, toujours au même endroit, suffisante pour empêcher de dormir. Et en plus je vais pisser toutes les 5 minutes. Du coup samedi matin j’appelle Sos médecin. Le docteur dit qu’il doit y a voir une infection urinaire en plus, que les antibiotiques vont agir. Il me donne une ordonnance supplémentaire et se barre. Je vais à la pharmacie, et là ça commence à se gâter : la fièvre monte et je tiens à peine debout. De retour chez moi ne je sais plus trop quoi faire. Je reste finalement chez moi et je passe encore une mauvaise nuit. Le dimanche matin j’ai encore dans les 38,5. J’appelle une infirmière de mes connaissance, lui demande son avis. Elle me conseille d’aller aux urgences, ce que je fais. Là bas, la fièvre a baissé, la douleur est toujours présente. On me fait une prise de sang, une radio abdominale, rien d’anormal. « Le foie n’est pas touché, dit le chirurgien ». Ben heureusement tiens, j’suis là pour qu’on me rassure, pas pour qu’on me trouve un truc grave !
On va vous faire un scanner. Bon. Le scanner c’est sympa, on te demande 10 fois si t’es allergique à l’iode, tu réponds que t’en sais rien, mais on verra bien. L’injection d’iode se fait par la perfusion qu’on m’a posé au début pour mettre un calmant. Ca fait assez bizarre, t’as l’impression de sentir tes veines chauffer. Même les yeux et l’anus se mettent à cuire… Sinon t’es dans un tunnel avec des capteurs qui tournent autour, rien de terrible. Ensuite c’est l’attente. La fatigue des nuits précédentes, la douleur toujours présente. Un peu d’angoisse, tout ça m’use. Je suis en « attente brancard », dans un couloir quoi.
Le chirurgien se pointe
C’est pas très bon, monsieur. Vous avez un abcès au colon (sur un diverticule). Il va falloir vous opérer, et peut être vous faire un anus artificiel. On peut essayer de drainer l’abcès sans grande ouverture, en cœlioscopie, mais le résultat n’est pas garanti. Ca dépend si l’intestin est déjà perforé ou non. Sinon il faudra enlever la partie malade.
Là t’en prend plein la gueule. Ca te brûle de partout et t’as envie de chialer. Ma femme et ma fille sont à 1000 bornes de là. Je ne pense qu’à ça, je ne peux même pas les revoir avant l’opération. Il faut que je les prévienne au téléphone. Depuis le début j’ai pas lâché mon portable. C’est pas autorisé mais ils ferment les yeux. J’appelle mais j’ai franchement du mal à parler. Elles vont prendre l’avion dès que possible.
Le chirurgien m’explique plus en détails ce qu’il va tenter, et m’indique qu’au pire je ne porterai l’anus artificiel (une poche sur le ventre) que quelques mois, et qu’ensuite on remet les 2 bouts d’intestin ensembles et que tout redevient comme avant. Ca s’appelle rétablir la continuité. Quand ça se passe bien.
On est le dimanche 10 octobre. Demain c’est mon anniversaire, j’aurai 36 ans. Il parait que je bats des records de précocité, ce genre d’abcès n’arrive en général qu’après 50 ans.
Je préviens ma mère, mais elle n’aura que le temps d’arriver devant la porte fermée du bloc, dans lequel je suis déjà.
Quand je me réveille je crois que j’ai plus mal qu’au départ, mais c’est normal. Je suis plein de tubes partout, dont une sonde naso-gastrique, et une autre dans la verge, c’est chouette de pouvoir pisser au lit. C’est le soir, je suis complètement à la ramasse, mais les infirmières sont sympas. L’une d’elle me caresse gentiment la joue, ça m’a marqué.
Ca ira mieux demain, ajoute-t-elle. Et là commence la ronde : toutes les 2 heures on vient te réveiller, te surveiller.
Le lendemain c’est mon anniversaire, visite des parents, d’une amie à moi que j’apprécie beaucoup, Marion, je lui ai dédié une chanson depuis.
Le chirurgien m’explique qu’il a tenté de drainer l’abcès en cœlioscopie. Je n’ai donc qu’une petite cicatrice et quelques trous…
On m’enlève la sonde naso gastrique. Ca fait du bien mais c’est une erreur, c’est trop tôt. Malgré les antibiotiques et l’opération, la fièvre ne baisse pas, la douleur est toujours là. Je passe encore une mauvaise nuit. Le lendemain mardi 12 octobre, le chirurgien fait sa visite du matin. Il n’a pas l’air très à l’aise, et précise qu’il aurait été plus tranquille et aurait passé une meilleure nuit s’il avait enlevé le bout d’intestin en cause. Sa sollicitude me touche ! Mais mon angoisse augmente. Du coup il décide de réopérer. Je rappelle ma femme, qui doit prendre l’avion le lendemain. Je lui dit au revoir, j’ai les boules.
Je repars au bloc, en grillant la priorité au passage à mon voisin qui est venu pour une appendicite qui n’a pas l’air trop urgente. Après réflexion je me suis rendu compte que je ne l’ai jamais revu après ! Rebelote donc au bloc, mais cette fois ils veulent me coller la sonde naso gastrique avant de m’endormir, question de sécurité me dit gentiment celle qui s’occupe de ça.
Cette sonde, pour ceux qui savent pas, c’est un grand tuyau qu’on t’enfile par le nez et qui doit descendre jusqu’ l’estomac et permettre d’aspirer les secrétions afin d’éviter notamment de se noyer dans son vomi. En temps ordinaire c’est un exercice pas très sympa, mais là, après l’opération, avec l’infection, la fatigue, la fièvre, et la péritonite, c’est carrément la torture.
Avalez, qu’elle me dit en enfonçant le tuyau…
Tu parles. Je commence à lui gerber gentiment sur les pieds
A ben je préfère que ce soit là que dans vous poumons dit elle. Avalez ! Et elle enfonce. L’ennui c’est qu’elle a pas remarqué que j’étouffe, que je re-gerbe, que ça me fait un putain de mal dans le bide. Et moi quand j’ai mal je cogne. Alors je balance des grands coups sur le matelas du lit de la salle d’opération.
Je réussi à reprendre ma respiration et lui balance « mais vous allez me faire crever » ! c’est sans doute nul, mais c’est la sensation que j’avais. Enfin ils me collent le masque. Je n’ai qu’une envie, m’endormir le plus vite possible. Vite. Quoi qu’il arrive.

Préambule

Il s'en est fallu d'un cheveu,
et votre vie en est changée.
Ca arrive à beaucoup. J'ai choisi vous confier cette expérience comme témoignage.
Voici un récit brut, à peine relu, qui sera révisé au fil des billets, des commentaires.
Ce blog est anonyme pour des raisons évidentes.
Avis aux parents : il contient des descriptions parfois crues qui peuvent heurter les âmes sensibles ou les mineurs.